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Journal d'un confinement mexicain, part II

04.04.20


" Pour le corps, ce n'est pas difficile de faire ses adieux à l'anesthésie du confort et aux bienfaits de la civilisation. Le mien s'habitue vite. Il n'est pas long à oublier que l'eau d'un bain a pu être chaude et la ration copieuse. L'ennui c'est l'âme... Elle est plus exigeante. Ellle supporte moins bien le jeûne. " Sylvain Tesson, L'Axe du loup.


En direct depuis notre villa rue Fuente de Trevi (Fontaine de Trévi) où l'on se croirait presque dans la version mexicaine de Desperate Housewives. En effet, la femme de ménage qui vient tous les samedis, la personne qui vient faire l'entretien de la pisicine chaque deux jours, les voisins qui promenent tous leurs 3 ou 4 chiens en fin d'après-midi... Mais pour ce qui est des histoires rocambolesques, des cadavres enterrés dans le jardin, finalement des interactions sociales quelles qu'elles soient, il faudra sans doute attendre la saison 2, après le confinement.


Les journées se suivent, et se ressemblent plus ou moins selon a, b ou c... Sachant que a/ arrive trop souvent, b/ quelquefois, c/ plus rarement et d/ jamais.


Je suis reveillé chaque matin par :

a/ Les pleurs de Basile depuis sa chambre

b/ Le chant d'un oiseau qui ressemble à l'alarme d'une voiture

c/ Un vendeur ambulant et son mégaphone

d/ Un groupe de mariachis devant la fenêtre


Après avoir ouvert fenêtres et rideaux et preparé le petit-déjeuner de Basile :

a/ Je bois un café en bouquinant ou en faisant du coloriage

b/ J'installe la baby-gym avec Basile

c/ On fait une cabane avec les mêmes matelas et coussins qui servent à la baby-gym

d/ Je commence à installer le barbecue pour la fête des voisins


La routine n'a jamais été mon fort, malgré tout on arrive à trouver un petit rythme. Beryl a repris le yoga ce que j'ai toujours beaucoup admiré et s'est mise au fitness via une application. De mon côté :

a/ Je fais ma demi-heure quotidienne de longueurs dans la pisicine

b/ Je fais du karaoké sur youtube

c/ Je me dis "je suis debordé, j'ai trop de trucs à faire aujourd'hui"

d/ Je vais faire un beach volley


En effet, aussi fou que cela puisse paraître il m'est arrivé de me réveiller le matin en me disant " je me sens trop bien aujourd'hui, ces quelques semaines vont être insuffisantes pour faire tout ce que j'ai envie de faire" et Beryl de me sourire sans grande conviction. Puis, le lendemain de lui dire "ça va être long quand même", et Beryl de me répondre "oui et ça fait que 3 jours". Egalement, faire les courses, aussi surprenant que cela soit, a toujours été un plaisir pour moi, et bien même cette simple joie nous est retiré. En effet, cela devient un exercice de pleine conscience épuisant : respecter les distances, bien se desinfecter les mains, ne pas se frotter le visage, surveiller le comportement des gens envers Basile, sachant que cette vigilance n'est pas le commun de tous...

Alors je casse la routine comme je peux, une de mes dernière idée : prendre mes douches avec le tuyau dans le jardin et non plus dans la salle de bain ! Mes parents en savent quelque chose, j'ai toujours adoré me doucher dehors.


Aussi, je redécouvre le goût pour des choses simples, que je ne fais pas assez habituellement :

a/ Je fais la cuisine presque tous les jours, même si je suis plus salades de riz, grecque, composée... que boeuf bourguignon

b/ LIRE je le dis toujours mais voyager = lire pour moi, confinement ou pas je suis encore suffisament en voyage

c/ Ne rien faire

d/ Faire un puzzle ! Une de mes dernières idées mais j'en ai pas encore trouvé au supermarché


Il serait faux de dire que la grande majorité de mes journées c'est écrire, lire et faire de la baby-gym avec Basile. Bien que j'ai parfois la nostalgie d'un temps où la technologie n'était pas une option lorsqu'il s'agissait de s'occuper, dans notre maison il y a :

a/ Netflix

b/ Youtube

c/ Le smartphone de Beryl

d/ Le Ipad de Basile


En effet, Basile n'a pas de Ipad et n'est pas debordé par le télétravail mais, à son rythme, il est en demande de toujours plus d'autonomie. Moi qui ai toujours eu soif de liberté et d'indépendance, c'est magnifique de le voir à son échelle prendre de plus en plus d'initiatives. En effet il sait ce qu'il veut, et bien qu'il soit en train d'apprendre à ne pas râler pour se faire comprendre,  il défait le canapé pour demander la baby-gym, il s'asseoit seul à table pour demander à faire du dessin ou à manger, il s'installe sur un coussin vers la tête de lit pour demander une histoire et aussi :

a/ Il adore aller lui même jeter à la poubelle sa couche

b/ Il essaye d'étaler lui même le savon sous la douche et nouveauté il a une petite brosse à dent

c/ Il a même préparé seul (ou presque) son repas : coupé une tomate et une saucissse et passé l'éponge sur la table après

d/ Il va à la boulangerie et m'emmène mon petit-déjeuner au lit tous les matins


Réaction amusée de ma mère quand je lui raconte : "vous en faites la boniche!" C'est vrai qu'on a beaucoup de chance aussi, car c'est un bébé qui dort beaucoup ! Chaque nuit entre 11 et 14h (Souvent 20h-9h30) et refait 2 siestes dans la journée : un vrai loir.


C'est en regardant des clips musicaux avec lui depuis notre télé-Youtube que j'ai une révélation, une chanson du dessin animé Raiponce (où est la vraie vie?) qui du haut de sa tour a tout compris au confinement, je ne résiste pas à insérer quelques paroles ici :


" (...) Ensuite je lis un livre et même deux ou trois

J'ajoute quelques couleurs qui ne plaisent qu'à moi Puis c'est guitare, tricot, gâteaux et quelquefois Je me demande où est la vraie vie ?


Après midi c'est puzzle, fléchettes et cookies Papier mâché, danse classique, échec et mat Poterie, théâtre de marionnettes et bougies Gymnastique, arts plastique, corde, et Pascal m'épate!


Puis je relis mes livres, je rêve d'aventures J'ajoute de la couleur, il en manque j'en suis sûre Ensuite je brosse, je brosse et brosse ma chevelure Dans cette prison où j'ai grandi Et je me demande, et demande, et demande, et demande Où se cache la vraie vie  ?"


Nous avons réservé notre villa à Wisteria Lane pour 2 semaines supplémentaires, soit jusqu'au 20 avril. Notre objectif est d'attendre au maximum en espérant rentrer à la fin du confinement en France, mais la réalité nous rattrape aussi, les liaisons internationales diminuent chaque semaine et les cas continuent d'augmenter autant en France qu'au Mexique. Dans mon for intérieur je me dis que la chose la plus sécure est de ne pas bouger, le voyage lui-même représentant un risque, mais il faut tout de même que nous puissions rentrer à un moment ou à un autre. Actuellement le trafic aérien est tel que nous sommes obligés de faire escale à Mexico City ; les liaisons vers la France depuis Cancùn (à 30 mn en taxi de où nous sommes) étant fermées. Cela semble peu probable que Cuba réouvre ses frontières d'ici la fin du mois. Nous allons sans doute essayer de rentrer fin avril-début mai, je laisse peu à peu mon envie de poursuivre ce voyage s'envoler, même si ce n'est pas une immense difficulté, des voyages il y en aura tant d'autres.


En ce temps de confinement où comme souvent dans la vie j'aime essayer de voir les choses avec l'angle le plus positif possible, je retiens une conversation intéressante que j'ai eue avec mon frère au téléphone. Il me dit que la Terre n'a jamais été aussi bien portante ces dernières années : le ciel de Paris est propre, les satellites revoient la Chine habituellement cachée par un nuage de pollution, les poissons reviennent à Venise... Il me plait d'imaginer que l'être humain ne tirera pas seulement des conclusions sociales, sanitaires et économiques de cette pandémie mais aussi écologiques. L'utopiste en moi s'amuse à penser que nous allons instaurer 1 mois de confinement annuel obligatoire par la suite, pas pour nous mais pour la Terre. Je me dis que le confinement humain est peut-être pour la planète ce qu'est le jeûne aux humains, ou la jachère aux champs : le renouveau, une respiration, la santé, une forme de salut !


En conclusion et sans transition, j'ai une pensée particulière, affective, naïve pour tous les gens qui ne peuvent plus descendre dans la rue avec leurs panneaux "Free Hugs" (câlins gratuits).


Free Hugs is not dead ! (Les câlins gratuits ne sont pas morts !)

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